Pour décrypter cette question, Emmanuel Véron est l’invité le podcast Horizons Marines sur la dissuasion chinoise enregistré avec nos amis du CESM. Nous y exposons les grandes lignes et enjeux de la montée en puissance nucléaire chinoise. Bonne écoute!
La Chine, longtemps attachée à une doctrine de « dissuasion minimale » et au principe du non-emploi en premier de l’arme nucléaire, connaît une transformation rapide de ses capacités stratégiques. Depuis 2015, la création de la Force des missiles, dédiée aux moyens nucléaires et spatiaux, a marqué un tournant majeur : modernisation, centralisation du commandement et montée en puissance technologique.
Dix ans plus tard, ces réformes ont porté leurs fruits. Pékin disposerait aujourd’hui de 500 à 600 ogives nucléaires, soit le double de 2020, et multiplie les nouveaux silos, modernise ses missiles intercontinentaux, perfectionne ses sous-marins nucléaires et investit dans les systèmes hypersoniques et à têtes multiples. Cette expansion rapide pourrait placer la Chine, d’ici la prochaine décennie, au rang de troisième grande puissance nucléaire mondiale, aux côtés des États-Unis et de la Russie.
Reste à savoir si Pékin demeure fidèle à sa doctrine défensive ou s’engage dans une course à la parité stratégique. Pour Emmanuel Véron, spécialiste de la Chine et enseignant à l’École de guerre, cette évolution traduit la volonté d’assurer une dissuasion crédible face aux puissances établies et de renforcer son poids dans l’ordre international.
Cette mutation, cependant, fait peser des incertitudes sur la stabilité globale : elle recompose les équilibres régionaux en Asie et accroît les risques d’escalade dans un contexte de rivalité sino-américaine croissante.