
Provenant du podcast Les Enjeux internationaux avec Emmanuel Véron, géographe, spécialiste de la Chine contemporaine, chercheur associé à l’école navale et à l’INALCO, membre de l’Institut Français de Recherche sur l’Asie de l’Est (IFRAE)
Selon Emmanuel Véron, la visite de Xi Jinping au Vietnam intervient alors que Hanoï se retrouve pris entre deux dépendances économiques : une intégration profonde au marché chinois et une forte exposition aux États-Unis, premier débouché de ses exportations. Le durcissement tarifaire américain fragilise directement l’économie vietnamienne, poussant le pays à diversifier ses partenaires et à jouer une diplomatie d’équilibre — la fameuse « diplomatie du bambou ».
Véron souligne que ce rapprochement avec Pékin n’efface en rien des tensions géopolitiques persistantes : militarisation chinoise en mer de Chine méridionale, pressions sur les eaux vietnamiennes, compétition stratégique. En recevant Xi Jinping, le Vietnam signale simultanément aux puissances occidentales et asiatiques sa volonté de ne dépendre de personne.
Du côté chinois, les hausses de droits de douane américaines offrent paradoxalement une occasion à Pékin de se présenter comme défenseur du commerce mondial et acteur stable, alors même que son économie traverse une période sensible. Cette posture extérieure s’accompagne d’un recentrage sur l’Asie : la tournée de Xi Jinping vise à renforcer les liens régionaux, contourner les barrières américaines via des chaînes de valeur asiatiques et accélérer un basculement géo-économique où l’Asie devient le cœur des échanges au détriment des marchés occidentaux.